J’accueille pour la première fois sur le blog un rédacteur invité, Louis Denizet. Diplômé de l’Ecole du Louvre, Louis travaille aujourd’hui au Département d’Art contemporain de la maison Sotheby’s à Londres. Il a rencontré la sculptrice Anne Millot lors d’une mission de médiation étudiante et a été touché à la fois par sa pratique artistique et par sa personnalité. Intrigué par ses oeuvres radicalement originales, qui parlent à l’imaginaire et inspirent le rêve, il a souhaité partager cette belle rencontre avec les lecteurs de L’Art aux Quatre Vents. Je suis très heureuse de sa confiance et fière de publier ici son article !

 

Anne Millot pratique un métier dont elle est l’une des seules au monde à détenir le savoir : elle est sculptrice de nez. Surprenant métier, me direz-vous, et pourtant ses œuvres sont délicieusement saugrenues. Allongé, affiné, aquilin, l’artiste décline le nez sous toutes ses formes en manipulant terre, verre, et bois. Des personnages réels ou irréels dont elle s’inspire, elle ne vous montre qu’un seul organe : à vous d’imaginer le reste…

Bien curieux sujet que celui du nez, et pourtant Anne le considère comme débordant de potentiel créatif. Après tout, il suffit de lire Edmond Rostand ou Carlo Collodi, l’auteur des aventures du célèbre pantin menteur, pour confirmer son importance dans le paysage littéraire. De même, un simple coup d’œil sur les personnages biscornus de Picasso permet de comprendre les nombreuses formes qu’il peut posséder.

On peut retracer la décision de l’artiste de se consacrer exclusivement à la création de nez à ses études d’anatomie. Plus tard, c’est en modelant de petits visages que celle-ci se rend compte du manque crucial d’attention porté au nez dans la culture visuelle, malgré son intérêt scientifique et artistique. Aujourd’hui, elle lui rend hommage au travers de ses créations qui se comptent au nombre de 180 !

Dans sa démarche artistique, Anne prend comme point de départ la photographie. Ensuite, elle s’adonne à un méticuleux travail d’observation pour trouver la caractéristique maîtresse de l’organe devant elle. Lorsque celle-ci se manifeste, l’artiste se tourne vers le médium. Le terre, par exemple, offre comme choix le grès, la faïence, ou encore la porcelaine, puis nécessite une étape de modelage, de séchage, de ponçage, et enfin de cuisson.

Curieuse et ambitieuse, Anne adore les défis et expérimente continuellement avec de nouvelles pratiques. En 2017, elle produit une première sculpture de nez en verre rétroéclairée sur bois, ainsi qu’une première sculpture mobile. L’œuvre vampirique, intitulée La Carmilla, se présente sous la forme de deux nez mécaniques qui dans leur rotation se transforment en canines sanguinolentes. Son succès est retentissant et permet à Anne de remporter le prix d’honneur lors du prestigieux Concours International de Céramique produit par le Vallauris Institute of Art.

Aujourd’hui, les nez d’Anne quittent l’atelier de plus en plus rapidement. En effet, les expositions personnelles et collectives en France, en Suisse, et en Angleterre ne cessent de s’enchainer. Prochainement, c’est à la Galerie Cyril Guernieri que vous pourrez retrouver les nouvelles créations de l’artiste, mais attention : l’exposition pop-up ne dure que 48 heures seulement ! Alors, n’hésitez pas à y fourrer le bout de votre nez…

L’exposition « Anne Millot : À plein nez » sera à la Galerie Cyril Guernieri, au 29 rue Mazarine 75006 Paris, le 11 et 12 novembre 2018 de 10h30 à 19h. Évènement spécial : performance « sculpture de nez live » le dimanche 11 novembre. Pour contacter l’artiste, rendez-vous sur www.anne-millot.com

LD